Le 1er février dernier, la nouvelle est venue faire trembler les murs de millions de foyer américains qui n’avaient vraiment pas besoin de ça, quelques jours après l’intronisation de Donald Trump comme président des États Unis. Malgré l’intensification de l’élevage du porc, les réserves de viande de porc diminueraient. De USA Today à NBC en passant par CBS, la panique se propage à tout le pays. Le risque : plus de bacon pour la première puissance mondiale.
Tout est parti d’un rapport de l’USDA, le ministère de l’agriculture des Etats-Unis, selon lequel les réserves de poitrine de porc seraient à leur plus bas niveau depuis cinquante ans. Rich Deaton, président du Conseil du porc de l’Ohio, un État américain, annonçait dans une déclaration « Les producteurs de porc battent des records historiques d’élevage, et pourtant nos réserves diminuent toujours ». Plusieurs journaux américains en font leurs gros titres. Le site internet Business Insider clame « Les réserves américaines de bacon à leur plus bas niveau depuis cinquante ans, et les prix pourraient monter en flèche », nourrissant son article des seules déclarations de Rich Deaton. En bref, le consommateur américain a déjà mal à son porte-monnaie.
Le problème, c’est que cette information est fausse. Steve Meyer, consultant pour le Conseil national des producteurs de porc, corrige « nous allons abattre 3% de porcs de plus que l’année dernière, (…) il y toujours beaucoup de bacon à venir ». Les réserves de bacon américaines sont donc toujours hautes. La déclaration de Rich Deaton est seulement, comme il le déclare fièrement plus tard dans la journée, un « coup marketing ». Son objectif : augmenter le trafic sur le site du Conseil de porc de l’Ohio, où il répond point par point aux inquiétudes des consommateurs américains craignant pour leur petit déjeuner. Par là, Rich Deaton veut augmenter la notoriété du porc de l’Ohio afin d’écouler ses stocks, abondants.
Grâce aux erreurs de nombreux médias américains, qui ont repris ces informations sans les vérifier, la nouvelle s’est rapidement propagée outre-Atlantique, et a conduit à une forte médiatisation de Rich Deaton et du Conseil du porc de l’Ohio. Une belle victoire pour les fake news, et une défaite pour le journalisme, qui aurait pu être facilement évitée si les journaux américains avaient vérifié leurs sources.