L’existence de certaines sociétés secrètes en une réalité historique. Francs-maçons, Illuminés de Bavière, Carbonari autant de groupes qui ont cultivé le goût de la discrétion, voire du secret, dans le but de préserver un intérêt particulier ou une philosophie commune. Le fait de ne pas divulguer leur savoir apparaît ainsi comme le moyen de protéger la pérennité, l’influence ou le pouvoir de ces sociétés. Mais une telle précaution ne peut que générer des phantasmes chez ceux qui sont tenu à l’écart du secret ou qui cherchent à le percer.
Dès lors, les sociétés secrètes sont un sujet de rumeurs prolifique pour les tenants des théories du complots qui voient en elles des officines puissantes et nuisibles, capable de peser sur le cours de l’histoire. Il convient donc, dans leur esprit, d’abattre cet « ennemi de l’ombre » et d’extirper cette « racine du mal ».
Les sociétés secrètes considérées comme source d’une influence néfaste pour l’ordre social
Au même titre que bien d’autres groupes humains (institutions, professions, syndicats, religions…) certaines sociétés secrètes ont pu peser dans l’évolution d’une société ou jouer ponctuellement un rôle lors d’évènements politiques majeurs. Mais leur pouvoir a souvent été surestimé car le mystère qui les entoure suscite généralement l’inquiétude et la peur, notamment pendant une période trouble. A contrario, en les désignant comme l’origine d’une menace ambiante, les esprits tourmentés se trouvent ainsi rassurés car ils peuvent associer un nom ou une image à leur crainte.
La Révolution française constitue, à cet égard, un exemple frappant. Par l’effroi qu’elle a provoqué sur certains groupes sociaux (aristocrates, prêtres réfractaires, paysans de Vendée…), cette période a donné libre cours a de nombreuses théories complotistes. Des sociétés secrètes, notamment les loges maçonniques ont alors été pointées du doigt par les détracteurs des idées révolutionnaires.
Si le rôle de la franc-maçonnerie est indéniable dans la maturation et la diffusion de la philosophie des Lumières, c’est sa responsabilité supposée dans la chute de l’Ancien Régime que les contre-révolutionnaires lui reprochent tout au long du XIXe siècle jusqu’au XXe.
Société secrète et bouc-émissaire : la réponse idéale aux maux d’une époque
Le concept du bouc-émissaire, personne désigné par le reste du corps social comme porteuse de tous les maux et contre laquelle toutes les violences peuvent se déchaîner, est très ancien. Les théories complotistes y ont régulièrement recours dans la mesure où elles ont besoin de personnifier le sujet de leur opposition. Ainsi, toute théorie du complot s’échafaude contre un coupable idéal.
Les juifs ont depuis longtemps, constitué une cible récurrente des dénonciateurs de complot. Leurs origines asiatiques, le poids de l’histoire du peuple hébreu, la discrétion souvent attachée à leur mode vie qui les différenciaient de société au ban desquelles ils s’étaient retrouvé rejetés, autant de prétextes qui les réduisaient au rang d’incontournables et perpétuels bouc-émissaires. Jugées comme inassimilables par ces sociétés, ils devenaient, de fait, l’étranger à éradiquer, tant sur un territoire qu’à l’échelle mondiale.
Perspectives actuelles : « puissances occultes » et conspirationnisme
La révolution digitale que nous connaissons actuellement a considérablement accru la visibilité des thèses conspirationnistes. Les réseaux sociaux permettent ainsi aux internautes d’accéder facilement à ces théories dont les partisans peuvent diffuser très librement le contenu, sans avoir à en justifier les sources et la véracité en retour.
Une autre évolution marquante tient dans le fait que c’est désormais l’Etat qui est identifier comme une puissance occulte, par l’intermédiaires de ses services de renseignement et des sécurités. Chaque vague d’attentats récents entraîne ainsi son lot de complots dénonçant l’implication de la CIA américaine, du Shin Beth israélien ou du FSB russe. Plus encore, c’est contre l’instauration d’un gouvernement mondial, fondé sur la coalition hétéroclite de gouvernements officiels, de communautés religieuses et de grandes firmes multinationales, au service d’un projet de mondialisation ultralibérale et déshumanisante que les groupes conspirationnistes étendent désormais combattre.
La réponse apportée pour contrer de tels discours parait d’autant plus délicate que toute tentative de démantèlement par les gouvernements ou les médias apparaissent généralement comme des preuves d’accointances coupables et de mensonges.