L’islam est-elle une religion misogyne ? C’est une question qui revient sans cesse, que ce soit dans les discussions au sujet du voile ou à propos de la polémique du burkini. Pourtant, le Coran encourage explicitement l’égalité et le droit des femmes.
L’égalité hommes – femmes est inscrite dans le Coran
Au 7e siècle, l’Islam a fondé une égalité spirituelle entre les hommes et les femmes, comme le montre ce verset :
« Les musulmans et musulmanes, croyants et croyantes, obéissants et obéissantes, loyaux et loyales, endurants et endurantes, craignants et craignantes, donneurs et donneuses d’aumône, jeûnants et jeûnantes, gardiens de leur chasteté et gardiennes, invocateurs souvent d’Allah et invocatrices: Allah a préparé pour eux un pardon et une énorme récompense. »
إِنَّ الْمُسْلِمِينَ وَالْمُسْلِمَاتِ وَالْمُؤْمِنِينَ وَالْمُؤْمِنَاتِ وَالْقَانِتِينَ وَالْقَانِتَاتِ وَالصَّادِقِينَ وَالصَّادِقَاتِ وَالصَّابِرِينَ وَالصَّابِرَاتِ وَالْخَاشِعِينَ وَالْخَاشِعَاتِ وَالْمُتَصَدِّقِينَ وَالْمُتَصَدِّقَاتِ وَالصَّائِمِينَ وَالصَّائِمَاتِ وَالْحَافِظِينَ فُرُوجَهُمْ وَالْحَافِظَاتِ وَالذَّاكِرِينَ اللَّهَ كَثِيرًا وَالذَّاكِرَاتِ أَعَدَّ اللَّهُ لَهُمْ مَغْفِرَةً وَأَجْرًا عَظِيمًا
De plus, le récit de la création du monde ne fait pas de différence entre les deux sexes : hommes et femmes proviennent tous les deux de la même essence. Contrairement au récit de la genèse dans l’Ancien Testament, dans lequel Eve a été créée à partir d’une côte d’Adam, donc tirée de l’homme… Point de départ de une culture sur l’infériorité des femmes.
En son temps, l’islam a donné de nouveaux droits aux femmes
Les femmes d’Arabie au 7e siècle n’avaient presque aucun droit. Une fois mariées, elles étaient considérées comme des biens par leurs époux. Le Coran a contribué à changer cette situation : il contient plusieurs versets qui accordent aux femmes des droits exceptionnels à l’époque.
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Le droit au divorce :
« Au cas où une femme constate de la part de son mari une attitude hostile ou un certain refroidissement, il n’y a aucun inconvénient à ce que les deux époux s’ingénient à trouver une formule qui leur permette de se réconcilier »
وَإِنِ امْرَأَةٌ خَافَتْ مِنْ بَعْلِهَا نُشُوزًا أَوْ إِعْرَاضًا فَلَا جُنَاحَ عَلَيْهِمَا أَنْ يُصْلِحَا بَيْنَهُمَا صُلْحًا ۚ وَالصُّلْحُ خَيْرٌ ۗ وَأُحْضِرَتِ الْأَنْفُسُ الشُّحَّ ۚ وَإِنْ تُحْسِنُوا وَتَتَّقُوا فَإِنَّ اللَّهَ كَانَ بِمَا تَعْمَلُونَ خَبِيرًا
Le Coran rend obligatoire le consentement de l’épouse pour divorcer, mais il va plus loin. En effet, les femmes sont autorisées à demander elles-mêmes le divorce et peuvent l’obtenir sans le consentement du mari ! De plus, tout est fait pour les protéger pendant et après que la séparation : le Coran commande aux hommes de s’assurer du bien-être moral et financier de leurs ex-épouses :
« Les femmes divorcées ont droit à la jouissance d’une allocation convenable, c’est un devoir pour les pieux. »
وَلِلْمُطَلَّقَاتِ مَتَاعٌ بِالْمَعْرُوفِ ۖ حَقًّا عَلَى الْمُتَّقِينَ
En d’autres termes, non seulement l’Islam donne aux femmes le droit de divorce, mais prévoit aussi une sorte de pension alimentaire.
Ni le christianisme, ni le judaïsme n’étaient allés aussi loin. Le premier n’autorise le divorce qu’en cas d’adultère (Matthieu 19:9). Si vous avez vu l’excellent Le Procès de Viviane Amselam, vous savez sans doute déjà que selon la loi juive, l’homme doit accorder de son plein gré le divorce religieux à sa femme. Sans cet octroi, la femme se voit enchaînée à son statut de femmes mariée et ne peut se remarier.
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Le droit à la propriété et à l’héritage :
« Voici ce qu’Allah vous enjoint au sujet de vos enfants : au fils, une part équivalente à celle de deux filles. S’il n’y a que des filles, même plus de deux, à elles alors deux tiers de ce que le défunt laisse. Et s’il n’y en a qu’une, à elle alors la moitié.»
يُوصِيكُمُ اللَّهُ فِي أَوْلَادِكُمْ ۖ لِلذَّكَرِ مِثْلُ حَظِّ الْأُنْثَيَيْنِ ۚ فَإِنْ كُنَّ نِسَاءً فَوْقَ اثْنَتَيْنِ فَلَهُنَّ ثُلُثَا مَا تَرَكَ ۖ وَإِنْ كَانَتْ وَاحِدَةً فَلهَا النِّصْفُ ۚ وَلِأَبَوَيْهِ لِكُلِّ وَاحِدٍ مِنْهُمَا السُّدُسُ مِمَّا تَرَكَ إِنْ كَانَ لَهُ وَلَدٌ ۚ فَإِنْ لَمْ يَكُنْ لَهُ وَلَدٌ وَوَرِثَهُ أَبَوَاهُ فَلِأُمِّهِ الثُّلُثُ ۚ فَإِنْ كَانَ لَهُ إِخْوَةٌ فَلِأُمِّهِ السُّدُسُ ۚ مِنْ بَعْدِ وَصِيَّةٍ يُوصِي بِهَا أَوْ دَيْنٍ ۗ آبَاؤُكُمْ وَأَبْنَاؤُكُمْ لَا تَدْرُونَ أَيُّهُمْ أَقْرَبُ لَكُمْ نَفْعًا ۚ فَرِيضَة
Ce verset est une véritable révolution en soi. Dans les sociétés préislamiques, les femmes n’avaient pas de droit de propriété ni de droit sur l’héritage. Elles se retrouvaient donc complétement dépendantes de leurs pères ou de leurs maris. Non seulement l’Islam autorise les femmes à posséder des biens, à contrôler leur argent, à faire du commerce mais il révolutionne complètement le droit de l’époque. Grâce aux versets du Coran, les femmes pouvaient désormais réclamer la moitié de la part de l’homme. Pourquoi moitié moins ? Il faut se souvenir du contexte : à cette époque, les femmes ne travaillaient pas. Si celles-ci avaient pu hériter de la même part que les hommes, chargés de la subsistance économique du foyer à l’époque, ils auraient été lésés. Ce verset visait donc l’équité entre les sexes.
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Le droit à l’éducation :
L’islam accorde une grande importance à l’éducation, qui est un devoir sacré. Tous les versets qui concernent l’éducation ne font aucune différence entre les hommes et les femmes. Un hâdith* rapporte d’ailleurs ces paroles du prophète Mohammed : « Chercher le savoir est une obligation pour tous les musulmans ». L’une des figures les plus respectées dans l’islam est d’ailleurs Khadija, la première épouse du prophète, véritable businesswoman riche et éduquée.
Si la vision coranique de l’éducation a été un tel bouleversement, c’est parce que les deux autres religions monothéistes n’avaient pas exactement la même. Dans le judaïsme notamment, l’étude de la Torah écrite et orale par les jeunes filles et les femmes est strictement interdite, car l’esprit des femmes est qualifié de « léger » (da’atan kalot). Depuis des siècles, les femmes n’avaient, en général, que l’obligation de connaître les règles qui leur permettaient de tenir leur foyer en conformité avec la loi juive et d’avoir une vie et un comportement répondant aux exigences de celle-ci.
Tout est (là encore) question d’interprétation…
Il est donc faux de dire que l’islam est une religion qui infériorise la femme. Si elle ne fonde pas une égalité juridique parfaite (notamment sur la question de l’héritage), elle a, lors de son avènement, considérablement amélioré le statut des femmes de l’époque.
Les inégalités et la rigidité dans certaines sociétés sont plutôt imputables aux hommes qui ont interprété la religion au cours des siècles, en accord avec leurs intérêts politiques – pouvoir, là aussi, exclusivement masculin. Et cela est aussi valable pour le christianisme ou le judaïsme !
Suivre les enseignement du Coran mène au progrès, au respect et à l’émancipation des femmes. Le premier mot du Livre n’est-il pas : « Lis ! » ?
Religion ou patriarcat ? Par l’islamologue Abdallah Chérif Ouazzani
*Hâdith est un mot arabe qui veut dire propos ou communication. On a donc désigné par hadiths les propos tenus par le prophète Mohammed.