Grand savant perse du XIe siècle, Avicenne (Ibn Sina en arabe) a considérablement influencé la médecine occidentale, au point de récolter le surnom de « docteur des docteurs ». Mais Avicenne est aussi un philosophe d’envergure et un fin connaisseur de l’Islam, à l’origine de concepts majeurs en métaphysique.
Un génie précoce
Ibn-Sina – ou Avicenne en français – est né en 980 à Boukhara, en Perse (actuelle Ouzbékistan). Dès sa petite enfance, il fait preuve d’une mémoire phénoménale. A 10 ans, il connaît le Coran par coeur et parle le grec en plus du persan. A l’adolescence, il étudie les mathématiques et la médecine à l’université de Boukhara. C’est cette discipline qui lui vaut tout d’abord sa célébrité. En effet, à 18 ans, il réussit à soigner le prince samanide Nub Ibn Mansur, atteint d’une grave maladie qui semblait incurable. Après cet exploit, le prince lui ouvre les portes de la riche bibliothèque du palais, où Avicenne va perfectionner sa culture. Il écrit son premier livre de philosophie à 21 ans et entame la traduction et le résumé des oeuvres d’Hippocrate et de Galien
Un philosophe novateur
Grand admirateur d’Aristote, Avicenne a laissé un immense héritage philosophique. Se situant à la fois dans la tradition humaniste grecque et dans la pensée islamique, sa pensée a traversé les frontières entre Orient et Occident à l’époque. Il clame que l’usage de la raison n’est pas en opposition avec la foi religieuse et théorise la distinction entre l' »essence » de l’être et l’existence, qui sera exploitée par Thomas d’Aquin. Cette pensée formera l’une des bases de la philosophie scolastique du Moyen-Âge chrétien. Et sera utilisée par Jean-Paul Sartre et les existentialistes des siècles plus tard !

Les organes internes selon le Canon d’Avicenne
« Docteur des docteurs »
Mais Avicenne est surtout connu pour son impact sur la médecine. Il n’est pas exagéré de dire qu’il est le père de la médecine occidentale. Ses travaux ont en effet été traduit dès le milieu du XIIe siècle par Gérard de Cémone et utilisés par les médecins chrétiens jusqu’au XVIIe siècle. les deux oeuvres les plus célèbres d’Avicenne sont le Livre de la guérison (Kitāb al-Shifā) sur la médecine de l’âme et le Canon de la médecine. C’est ce dernier livre qui devient l’oeuvre la plus utilisée par les médecins et étudiants de toute l’Europe entière. Inspiré par la médecine persane, hindoue, tibétaine et même chinoise, Avicenne crée cette véritable encyclopédie des maladies et des traitements adéquats. Il est à l’origine de plusieurs découvertes majeures en médecine : la circulation du sang entre le coeur et les poumons, les symptômes du diabète, pressent le rôle des rats dans la propagation de la peste (qui décimera l’Europe au XIVe siècle), propose de tester les médicaments sur les animaux avant de les utiliser sur les humains… C’es aussi le premier à s’intéresser aux effet de l’environnement sur la santé : il émet l’hypothèse selon laquelle l’eau et le sol seraient vecteurs de certaines maladies et faciliteraient la contagion.
La richesse et la nouveauté des découvertes d’Avicenne en ont font l’une des figures les plus respectées d’Orient : durant son vivant, plusieurs princes de l’Asie l’appelèrent à leur cour, le roi de Perse le nomma vizir… Mais même après sa mort en 1023, son influence de cessa de grandir. Ses théories ne seront dépassées que pendant la Renaissance, à partir de la découverte de la circulation sanguine (1628), soit 600 ans plus tard. La médecine occidentale telle que nous la connaissons ne serait rien sans le « prince des savants ».
Sa statue trône dans l’amphithéâtre de l’école de mecine de Paris sans que les étudiants n’y prête plus d’attention que ça